« Pont route-rail Brazzaville-Kinshasa : le concessionnaire sera désigné en septembre » a eu la gentillesse de titrer le quotidien en ligne de Jean-Paul Pigasse – Les Dépêches de Brazzaville du mardi 11 Février 2025.
Sassou et Thisékédi, des voyous à la tête des deux Congo, ont sorti une fois de plus leur serpent de mer : « le pont sur le Congo. »
L’expression « serpent de mer » désigne dans le vocabulaire journalistique un « sujet rebattu et peu crédible auquel on recourt néanmoins dans les périodes creuses. »
Sauf que « creuse », l’actualité ne l’est pas. Difficile de comprendre cette annonce quand résonne le bruit des bottes rive gauche dans sa partie orientale et explose la crise socioéconomique rive droite, sans compter, à Brazzaville, les effet collatéraux de la guerre Tshisékédi-Kagamé .
Depuis le temps qu’on nous rabat les oreilles avec cette information, il est plus facile de croire en l’existence de Mokilibembé qu’au projet des timoniers des deux rives de jeter un pont sur le Congo.
La SNE et la SENELEC
Ce Loch Ness (le pont) est une escroquerie intellectuelle du même tonneau que le partenariat envisagé entre les voyous congolais et les malfrats sénégalais sur la commercialisation de l’électricité au Congo alors que le fameux Sénélec passe pour une entreprise qui a la réputation de plonger chaque fois Dakar dans les ténèbres. Ils appellent ça « coopération sud-sud. » C’est le comble du développement autocentré et extraverti des idéologues des années 70.
A la recherche du temps perdu
Depuis que la triade Pont-Route-Rail a été envisagée sous Sassou 2 et Kabila-père, ils en sont encore à la recherche du « concessionnaire » idéal comme si depuis le temps que dure cette comédie humaine ils avaient réellement le « cœur à l’ouvrage. » et nager dans le sens du « courant de l’histoire ».
Nul besoin d’être Madame Irma pour pronostiquer que le projet aussi grandiose que mal ficelé va tomber à l’eau si on persiste à le confier à nos deux canards boiteux. Imaginez-vous Sassou et Tsisékédi porter cet ouvrage pharaonique sur leurs frêles épaules alors qu’on compte à leur actif la destruction des chemins de fer Kinshasa-Matadi, Brazzaville/Pointe-Noire et du maigre réseau routier existant dans leur pays respectif !
Jean-Jacques Bouya
En tout cas, rendons hommage au camarade Jean-Jacques Bouya des Grands Travaux et des gros Eléphants blancs car au moins il « ne lâche pas l’affaire ». Bon prince, il a au passage, apporté l’eau au moulin de la propagande. Ecoutez-ça :
« Le président Denis Sassou N’Guesso est le champion du projet pont-route-rail sur le fleuve Congo, avec l’extension du chemin de fer de Kinshasa vers Ilebo. Ce projet pont-route-rail s’inscrit dans le cadre de la mise en œuvre du corridor 13 de l’Union africaine » flatte-il dans les colonnes des Dépêches.
Sassou est en effet un « champion » sans trophée en un demi-siècle de magistrature suprême.
Pour le malheur des « deux capitales les rapprochées au monde », le magnifique projet est entre les mains de…deux bras cassés. Félix Antoine Tsilombo Tsisékédi, le compère d’en face, pilote à vue un bateau ivre qui prend l’eau dans son flanc oriental t tandis que l’infatigable Sassou peine à ériger un barrage sur la Sounda dans le Kouilou depuis 1979, date de son premier coup d’état.
Maçons
Sassou vivant, le viaduc sur le fleuve Congo ne verra jamais le jour. Donc Pont-Route-Rail est un bébé mort-né. La science ésotérique est toujours ce qu’elle est. On pensait l’idéal maçonnique fondé sur la réalisation des grandes œuvres, comme les pyramides en Egypte, les Eglises du Moyen-âge, le tunnel sous la manche etc. L’étonnant c’est voir deux éminents frères de lumière (autoproclamés) de la trempe de Denis et Antoine, peiner à bâtir leurs propres pays.
Où est donc passée l’âme de constructeur de Cathédrales prônée par le Grand Architecte de l’univers ?
Point de pont
« L’idée du pont a fait naufrage dès que les deux chefs d’Etat les plus bêtes du monde s’en sont emparés » a cingla Gérard Bitsindou alors qu’il écoutait avant sa mort une chanson de son mentor Joseph Kabasélé dit Grand Kallé Jeff.
Les études de faisabilité succèdent aux poses des premières pierres sans qu’il y ait le moindre début de commencement d’exécution du viaduc entre les deux villes-capitales, dit-on, « les plus proches du monde » ce qui, du reste, aurait dû pourtant rendre leur jonction plus facile si tant est que les deux villes se touchent presque !
Cependant, comme Sisyphe et son rocher, les deux Etats économiquement les plus faibles de la CEMAC, malgré leurs richesses minières, tentent le coup, sans y parvenir. Les deux pays souquent ferme. Mais ils « bloquent. » Ils ont toujours bloqué quand il s’agit de développement et et de bien-être de leurs populations.
Depuis que Kabassélé Grand Kallé et Franklin Boukaka en ont rêvé, beaucoup d’eau a coulé sous le pont. Les dirigeants des deux capitales jumelées l’ont noyée dans les profondeurs du « mevloppement » (Kalombo Pinga). (Etat entre sous-développement et développement).
Au 19ème siècle, pour des raisons d’expansion impérialiste (au sens léniniste) les deux explorateurs Savorgnan de Brazza et Morton Stanley, n’avaient d’autres choix que mettre face à face les deux points de rupture de charge puisque le fleuve Congo cesse géologiquement d’être navigable à cet endroit précis où seront envisagées deux voies ferrées l’une rive gauche (Léopoldville/Matadi) et l’autre rive droite (Brazzaville/Pointe-Noire) afin d’évacuer les matières premières vers l’Europe.
L’historienne Catherine Coquery-Vidrovitch, a étudié cette formation du capital basée sur l’exploitation des richesses locales par les compagnies concessionnaires au Moyen-Congo. Elles chargent et déchargent à Brazzaville rive droite et à Léopoldville (Kinshasa) rive droite. Ainsi se justifie la proximité symétrique des deux capitales, Kinshasa et Brazzaville, exploitées par deux système coloniaux, revers d’une même pièce. Le grand capital évitera surtout de transformer les richesses sur place puisque les colonies passent strictement pour des réserves et dialectiquement pour des déversoirs de produits manufacturés. Kinshasa et Brazzaville seront des comptoirs où pullulent des maisons de commerce et jamais d’industries de transformation lourdes ou légères. La situation de mévloppement trouve sa source dans cette exploitation sauvage des colonies par le capitalisme.
Distance capitale
Du point de vue politique, voire même culturelle, jamais deux villes n’ont été aussi éloignées l’une de l’autre comme le sont les deux capitales dont, in fine, le seul point commun est d’abriter deux violents dictateurs autoproclamés Présidents de la République à l’issue d’écœurantes fraudes électorales. Pour le reste, Tsisékédi Antoine Félix est en train d’en découdre avec son voisin de l’Est, Paul Kagamé, tandis que Denis Sassou-Nguesso, sanglant despote, file le parfait amour avec le même Paul Kagamé également tyran médiéval comme jamais la science politique africaine n’en a jamais fait l’anatomie depuis Idi Amin Dada et Mobutu Sésé Séko.
Maloukou versus Kombé
Quant au choix du site sur lequel allait être érigé ce mythique pont sur le Congo, nous eûmes des poncifs du genre : « des attaques terroristes des Ninjas de Bernard Kolélas ou de Ntoumi si le viaduc était jeté au sud de Brazzaville, par exemple, sur le site de Kombé, après l’île du Diable, où la distance entre les deux villes ne dépasse guère le kilomètre. »
Pour éviter une perfidie Ninja, l’ouvrage sera alors érigé à Maloukou-Tréchot, point géographique où pourtant la superficie du Pool Malébo dépasse l’entendement (c’est un grand lac du’une près d’une dizaine de kilomètres de long qui séparant les deux rives).
Le tribalisme a ses raisons que la raison ignore.
Vous voyez comme des logiques absurdes habitent la tête de notre grand timonier d’Oyo ! Mais qui leur a fait croire que le pouvoir était un long fleuve tranquille ? Mais qui donc leur a historiquement dit que leur présence à la tête du Congo est éternelle ?
Comment ne pas en déduire que les intentions de sabotage qu’ils prêtent aux milices Ninja seront mises à exécution par les Cobras quand leur leader perdra le pouvoir ? Un cobra mort ou vif, ça mord.
Un homme à la mer !
« Initiée depuis plusieurs décennies, l’érection du pont sur le fleuve Congo censé relier les deux capitales avance à pas de tortue. En décembre dernier, le chef d’Etat de la République démocratique du Congo, Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo, annonçait pourtant la pose de la première pierre en septembre de cette année. En réalité, les deux gouvernements peinent à mobiliser les investisseurs réticents sur l’impact économique de la réalisation d’un tel projet » critique Fiacre Kombo (Les Dépêches de Brazzaville)
Avec ou sans la volonté des dictateurs des deux Rives aucune œuvre pharaonique n’est irréalisable quand on tient compte des avancées technologiques actuelles en matière de travaux pharaoniques. L’ingénierie chinoise parvient à vaincre des bras de mer en exécutant des viaducs entre des iles et le continent.
A côté de ces ouvrages titanesques, jeter un pont ou creuser un tunnel entre les deux capitales les plus proches du monde est un jeu d’enfant. L’argument du concessionnaire introuvable est une façon de noyer le poisson.
Vivement qu’on jette ces rois fainéants à la mer.