“Des trois blessés admis aux urgences, il y en a un qui est mort, victime d’un tir par balle. Pas d’un tir de la police ou de la gendarmerie, mais de quelqu’un qui a certainement voulu se défendre”, a déclaré le représentant de l’Etat devant la presse, sans donner d’autres détails.
Un peu plus tard ce mercredi, le Haut-commissariat a annoncé qu’une deuxième personne avait été tuée, sans précision sur les circonstances de ce décès.
Une deuxième personne tuée pendant les émeutes en Nouvelle-Calédonie #AFP 1/2 pic.twitter.com/P4cdsIIvtB
— Agence France-Presse (@afpfr) May 15, 2024
La même source a indiqué que plus de 130 interpellations durant ces émeutes. “Plusieurs dizaines d’émeutiers ont été placés en garde à vue et seront présentés à la justice”, a précisé le Haut-commissariat dans un nouveau point de situation.
???? Point de situation n°3 sur les graves troubles à l’ordre public ???? pic.twitter.com/iq7AdlwCvx
— Haut-commissariat en Nouvelle-Calédonie ???????? (@HC98800) May 14, 2024
– “Une spirale mortelle” –
“L’heure n’est pas grave, elle est très grave. Si l’appel au calme n’est pas entendu, il va y avoir beaucoup de morts dans l’agglomération de Nouméa aujourd’hui. On est rentré dans une spirale dangereuse, une spirale mortelle”, a estimé Louis Le France au cours d’une conférence de presse tenue ce mardi.
Le Haut-commissaire a annoncé qu’il y a eu plusieurs “échanges de tirs de chevrotine entre les émeutiers et les groupes de défense civile à Nouméa et Paita”. Une “tentative d’intrusion à la brigade (de gendarmerie) de Saint-Michel” s’est également produite.
“Je vous laisse imaginer ce qui va se passer si des milices se mettaient à tirer sur des gens armés”, a poursuivi Louis Le France. Il a qualifié la situation d'”insurrectionnelle” dans l’archipel.
– L’Assemblée nationale vote le texte –
Alors que ces “graves troubles à l’ordre public sont toujours en cours”, selon le communiqué qui fait état de “nombreux incendies et pillages de commerces, d’infrastructures et d’établissements publics, dont plusieurs écoles et collèges”, les députés à Paris ont adopté, après les sénateurs, le texte du gouvernement par 351 voix contre 153.
✅????️ Nouvelle-Calédonie : l’Assemblée nationale a adopté, par 351 voix “pour” et 153 voix “contre”, le projet de loi constitutionnelle visant à élargir le corps électoral spécifique aux élections du congrès et des assemblées de province de l’archipel.#DirectAN pic.twitter.com/jgL3RarFUR
— LCP (@LCP) May 14, 2024
La réforme devra encore réunir les trois cinquièmes des voix des parlementaires réunis en Congrès à Versailles, mais Emmanuel Macron a promis qu’il ne le convoquerait pas “dans la foulée” de ce vote, pour laisser une dernière chance aux discussions entre les parties locales.
Ce projet de loi constitutionnelle vise à élargir le corps électoral aux élections provinciales, cruciales dans l’archipel. Les partisans de l’indépendance jugent que ce dégel risque de “minoriser encore plus le peuple autochtone kanak”.
– Ecoles et aéroport fermés –
Au vu des heurts de la nuit, les établissements scolaires “resteront fermés jusqu’à nouvel ordre”, a annoncé le Haut commissariat dans la matinée. L’aéroport de La Tontoura quant à lui “reste fermé aux vols commerciaux”.
Mardi, le Premier ministre Gabriel Attal avait appelé au dialogue et à l’apaisement durant les questions au gouvernement au Palais Bourbon.
“Les violences ne sont ni justifiables, ni tolérables”, a poursuivi le chef du gouvernement, “notre priorité aujourd’hui, c’est le retour au calme”.
Dans l’agglomération de Nouméa, le couvre-feu décrété par le Haut-commissaire de la République est entré en vigueur mardi à 18h00 locales (09h00 à Paris).
Sur fond sonore de cris et de détonations, quelques personnes ont osé braver l’interdiction, a constaté un correspondant de l’AFP.
Dans la banlieue de Doumbéa (nord), un groupe de jeunes marchait les bras chargés de cartons issus du pillage de commerces.
#NouvelleCalédonie #Nouméa #Carrefour kenu-in en cours de pillage… pic.twitter.com/NWAL67VKKr
— Toto Orms (@ormstoto) May 15, 2024
Un peu plus loin, des hommes se sont déployés pour protéger leurs habitations. “C’est la merde, que la réforme du corps électoral passe ou pas”, a déploré l’un d’entre eux, Thomas, qui n’a pas donné son nom.
A la tombée de la nuit, les actes de vandalisme ont repris de plus belle. Une grande enseigne de sport de la banlieue de Nouméa a été pillée, selon une correspondante de l’AFP.
“Un mouvement collectif impliquant une cinquantaine de détenus”, qui avait débuté dans la nuit de mardi à mercredi dans la prison du Camp-Est de Nouméa, a par ailleurs été “maîtrisé” par les forces de l’ordre, a indiqué la Chancellerie.
Le Haut-Commissariat avait parlé de “mutinerie”. Des vidéos postées sur les réseaux sociaux montraient des détenus cagoulés et brandissant des barres métalliques se déplaçant dans des couloirs de la prison.
Magasins pillés, maisons incendiées, tirs sur les gendarmes: dans la nuit de lundi à mardi, le territoire français du Pacifique Sud a connu ses plus graves violences depuis les années 1980.
– “Détermination” –
“Plus de 70 policiers et gendarmes ont été blessés”, a indiqué le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin lors des questions au gouvernement à l’Assemblée nationale.
“80 chefs d’entreprises ont vu leur outil de production brûlé ou détruit”, a-t-il précisé.
Nouvelle-Calédonie : ce soir, après le vote du texte, “le Président et le Premier ministre écriront à toutes les parties calédoniennes pour les inviter dans les prochains jours à Paris” afin de “trouver un accord global pacifique”, assure @GDarmanin.#DirectAN #QAG pic.twitter.com/gkkkvvvsOX
— LCP (@LCP) May 14, 2024
Le président de l’Union calédonienne (indépendantiste) Daniel Goa a demandé à la jeunesse de “rentrer chez elle” et condamné pillages et exactions. “Les troubles de ces 24 dernières heures révèlent la détermination de nos jeunes de ne plus se laisser faire par la France”, a-t-il toutefois commenté.
La principale figure du camp non-indépendantiste, l’ex-secrétaire d’Etat Sonia Backès, a dénoncé le racisme anti-blancs de manifestants qui ont incendié la maison de son père, septuagénaire, exfiltré par le GIGN.
“S’il n’a pas été attaqué parce qu’il était mon père, il a au moins été attaqué parce qu’il était blanc”, a-t-elle affirmé sur BFMTV, déplorant des “insultes racistes”.
Violences en #nouvellecalédonie : alerte rouge à la pollution de l’air dans certains secteurs de l’agglomération de #nouméa. https://t.co/TmdpNbb3oS pic.twitter.com/xiTXq8skd4
— NC La 1ère (@ncla1ere) May 15, 2024
– “Déchaînement” –
Les premières altercations entre manifestants et forces de l’ordre avaient commencé dans la journée de lundi, en marge d’une mobilisation indépendantiste contre la réforme constitutionnelle.
Dans la crainte d’un enlisement, des éléments du GIGN, du RAID (son équivalent pour la police), quatre escadrons de gendarmes mobiles et deux sections de la CRS 8, une unité spécialisée dans la lutte contre les violences urbaines, ont été mobilisés.
Des renforts étaient en cours d’acheminement dans l’archipel, a annoncé Gérald Darmanin.
50 membres du GIGN, unité d’élite de la gendarmerie, vont être envoyés d’ici la fin de la semaine, a précisé une source proche du dossier à l’AFP, en plus des 15 membres déjà arrivés en renfort mardi. Ce qui portera au total à une centaine les effectifs du GIGN présents sur l’île.
www.imazpress.com avec l’AFP