Le Sénégal, à travers ses nouvelles autorités, accorde une importance capitale à sa jeunesse,
considérée à juste titre comme la pierre angulaire du développement socio-économique et
culturel. Cependant, l’enfance, qui constitue la phase déterminante de la construction de cette
jeunesse, fait face à de nombreux défis. Malgré l’existence de politiques publiques et
d’entités institutionnelles dédiées à la protection des enfants, les résultats escomptés peinent à
se matérialiser.
Ce bref rapport vise à démontrer la nécessité de créer un Haut Commissariat à l’Enfance,
un organe central (se substituant à certains autres existants), transversal et décisionnel,
capable de coordonner, d’harmoniser et de dynamiser les actions en faveur de l’enfance au
Sénégal. En se basant sur un diagnostic des problématiques actuelles, ce rapport définira les
missions spécifiques du Haut Commissariat, mettra en évidence sa complémentarité avec les
structures existantes et proposera des pistes concrètes pour actualiser et mettre en œuvre des
cadres juridiques tels que le Système National de Protection de l’Enfance (SNPE) et le Code
de l’Enfance.
- Contexte et diagnostic des défis actuels
1.1. Les défis structurels liés à la protection de l’enfance
Les enfants au Sénégal font face à une série de défis qui limitent leur épanouissement et
compromettent leurs droits fondamentaux :
Pauvreté et inégalités : une part considérable des enfants sénégalais vit sous le seuil
de pauvreté, ce qui entrave leur accès à l’éducation, à la santé et à une alimentation
adéquate.
Travail des enfants : en dépit des lois en vigueur, un pourcentage significatif
d’enfants (particulièrement en milieu rural) est impliqué dans des activités
économiques, souvent au détriment de leur scolarisation.
Exploitation et abus : les violences physiques et sexuelles ainsi que le mariage
précoce n’ont pas disparu.
Manque d’accès à l’éducation : bien que des efforts notables aient été faits, le taux
de scolarisation reste faible dans plusieurs zones rurales, notamment chez les filles. La
privation de l’accès à l’éducation constitue une forme de maltraitance.
Enfants talibés et enfants de la rue : les enfants placés dans certaines daaras ou
vivant dans la rue constituent des groupes particulièrement vulnérables, nécessitant
des interventions adaptées.
1.2. Fragmentation institutionnelle
Les responsabilités liées à la protection et au bien-être des enfants sont éclatées entre
plusieurs ministères et agences, notamment :
Le Ministère de la Famille et des Solidarités
Le Ministère de l’Éducation nationale
Le Ministère de la Santé
Le Ministère de la Justice
Cependant, l’absence de coordination efficace entre ces entités engendre :
une duplication des efforts
un gaspillage de ressources
une absence de vision stratégique commune
un manque de visibilité de l’action publique
1.3. Inadéquation des cadres juridiques
Le Sénégal dispose de textes juridiques relatifs à l’enfance, mais ces cadres sont souvent :
obsolètes : non alignés sur les réalités socio-économiques actuelles.
peu appliqués : faute de moyens et d’une volonté politique forte.
incomplets : des outils essentiels, comme le Code de l’Enfance, attendent toujours
d’être finalisés.
- Missions et objectifs du Haut Commissariat à l’Enfance
2.1. Missions
Le Haut Commissariat à l’Enfance serait un organe transversal chargé de : - Coordonner la mise en œuvre des politiques nationales relatives à l’enfance, en
rassemblant tous les acteurs concernés. - Harmoniser les initiatives des ministères, des collectivités locales, des ONG et des
partenaires internationaux, tout en se substituant à certaines structures publiques (en
absorbant leurs agents) afin d’éviter les doublons et de gaspiller la ressource publique. - Superviser l’application des textes législatifs et proposer des réformes adaptées aux
réalités contemporaines. - Renforcer la protection sociale des enfants vulnérables en développant des
programmes ciblés. - Mobiliser des financements innovants pour les projets liés à l’enfance.
2.2. Objectifs stratégiques
Réduction des inégalités sociales en assurant un accès équitable aux services de base
(éducation, santé, protection).
Finalisation et opérationnalisation des cadres juridiques, notamment le SNPE et le
Code de l’Enfance.
Renforcement des capacités institutionnelles et locales pour une gestion efficace
des problématiques liées à l’enfance.
Amélioration des indicateurs nationaux en matière de scolarisation, de santé
infantile et de protection.
- Impact attendu
3.1. Gouvernance renforcée
Une meilleure coordination des politiques liées à l’enfance.
Une utilisation plus efficace des ressources.
Lisibilité et contrôle de l’action publique
3.2. Amélioration des conditions de vie des enfants
Réduction du taux de travail des enfants.
Meilleure prise en charge des enfants vulnérables.
3.3. Positionnement international
Le Sénégal pourrait devenir un leader en Afrique en matière de protection de l’enfance,
attirant ainsi des partenariats stratégiques.
Par Laurent BONARDI